DANS LA MARGE

et pas seulement par les (dis) grâces de la géographie et de l'histoire...

mardi 20 janvier 2009

P. 70. Cinémusiques poésies

Pour ne point trop laisser ce blog en friche
au cours d'une brève mise en sommeil
quelques racines, galets, feuilles non mortes...

Bande originale de film :

Georges Delerue pour "Le mépris" de Jean-Luc Godard (1963).

Axel Robbins :

- "Pour reprendre la rhétorique du générique, lequel est passé dans la légende, on pourrait dire que dans Le Mépris, il y a le sexe et la mort (les deux histoires principales du cinéma selon l'oncle Jean-Luc un peu désabusé des Histoire(s)), mais il y a, aussi et avant tout, le cinéma lui-même, immortel et resplendissant dans la lumière du soleil méditerranéen, être brillant qui résiste à tous les coups qu'on lui inflige et qui finira par s'imposer contre vents et marées.
Oui, Le Mépris de Godard est un poème d'amour au septième art, mais l'on a affaire, non à une poésie douce et complice à l'eau de Truffaut, mais à une poésie dans laquelle la violence et la douleur font souvent irruption, poésie lancinante et déchirante, hymne d'adieu on ne peut plus émouvant et sincère - signalons à cet égard la musique de Georges Delerue qui participe d'un sentiment pénétrant d'assister à la fin d'un monde - non seulement à la vie d'un couple (Paul et Camille) qui se défait devant nos yeux, mais aussi aux films et aux cinéastes dont les fantômes hantent les couloirs de l'inconscient collectif de tous les cinéphiles et de tous ceux qui, ne serait-ce que quelques fois dans leur vie, ont succombé à la tentation ô combien délicieuse de regarder défiler des ombres à la lumière de la lanterne magique."
(Ciné-Club Normale Sup', 14 novembre 2003).

Sous l'affiche à la provocation ne déplaisant pas à Godard, le thème de Camille composé par Georges Delerue.

Baroque :

Mozart, "Vesperae solennes de confessore", K. 321, psaume 117 (Septembre 1780). Pour quatre voix, choeur, deux trompettes, trois trombones, violons, basse, orgue et timbales.

The Amsterdam Baroque Orchestra and Choir.
Barbara Schlick, soprano.
Direction : Tom Koopman.

- "Les cordes nous conduisent immédiatement à une berceuse irradiante de beauté, baignée d'un lyrisme extatique (...) Lorsque le choeur, à pas de loup, rejoint la soliste, d'abord sur des valeurs longues puis en douces ponctuations du chant féminin, on atteint au coeur émotionnel de toute l'oeuvre (...) Voilà sans conteste l'une des plus belles pages de la musique religieuse de Mozart."
(Encyclopédie de A à Z, Robert Laffont, Coll. Bouquins, 2006, 1097 p.)


Chanson :

Paolo Conte, Max (Verona, 2005).

Max era Max
più tranquillo che mai,
la sua lucidità…

Smettila, Max,
la tua facilità
non semplifica, Max.

Max
non si spiega,
fammi scendere, Max
vedo un segreto
avvicinarsi qui, Max.


Documentaire :

Claude Lanzmann, "Shoah" (1985).

Présentation par France 5 :

- "Shoah est une oeuvre monumentale : onze ans de travail, dix campagnes de tournage. Entre 1976 et 1981, trois cent cinquante heures de film ont été tournées.
L'écrivain et cinéaste Claude Lanzmann a méthodiquement suivi les traces de l'infamie, relevé les pièces à conviction, identifié les lieux et écouté victimes, criminels et témoins actifs ou pas.
Ici, aucune image d'archives, les hommes et les paysages constituent sa seule et unique matière. Des lieux qui paraissent désincarnés, apaisés, mais qui en quelques mots revêtent toute leur horreur.
Ce film n'a pas pour but de comprendre ni d’expliquer de façon rationnelle la destruction méthodique des Juifs d'Europe. "Il y a des moments où comprendre, c'est la folie même", déclare le réalisateur, qui préfère dire et faire dire les faits : les moyens de transport des déportés, la topographie des camps, la disposition des corps, l’organisation du temps.
L'enquêteur pose les questions qui font mal à ses interlocuteurs, à lui-même et aux spectateurs. Un refus de comprendre et donc d'admettre.
Shoah, oeuvre intemporelle, a déjà fait le tour du monde."
(21 mai 2008).

Bande annonce de ce film dont le titre est parvenu enfin à mettre un nom sur l'innommable, sans connotations religieuse ou autres qui aient été réductrices.
Lanzmann est au documentaire de cinéma ce que sont aux recherches historiques des Klarsfeld pour la France ou Maxime Steinberg pour la Belgique. Des caractères redoutables de persévérance et de détermination. Des re-découvreurs de tant de vies gazées, fusillées, pendues... Toute une partie de la population européenne et donc de ses cultures qui fut réduite en cendres dans une large indifférence quand ce ne fut pas avec l'aide de régimes et de collaborateurs zélés du nazisme.

Le cheminot du train de Treblinka se souvient... Une séquence silencieuse mais douloureusement parlante !

Film de fiction :

Jean-Luc Godard, "Pierrot le fou".

Synopsis :

- "Ferdinand Griffon, ex professeur d'Espagnol, ex stagiaire à la télévision, marié à une richissime italienne, lit à sa petite fille des pages d'Elie Faure consacrées à Velazquez. Une jeune fille, Marianne, vient garder les enfants. Les Griffon se rendent à une réception bourgeoise chez des amis, où chacun débite des slogans publicitaires, exception faite de Samuel Fuller qui parle de cinéma. Ferdinand jette un gâteau au visage des invités et, retrouvant Marianne qu'il a jadis aimée chez lui, part à l'aventure.
Mais Marianne déclare qu'il faut d'abord se débarrasser d'un cadavre et lui confie que son frère Fred l'a placée dans une bande rivale de la sienne pour l'espionner. Le couple est poursuivi par la police. Ils vivent quelques jours comme des naufragés sur une île déserte. Un nain, membre de la bande, emmène Marianne. Ferdinand le découvre assassiné et se fait matraquer par deux complices.
Ferdinand retrouve enfin Marianne. Elle le présente à Fred qui lui propose de participer à un hold-up. Le coup réussit mais Ferdinand comprend qu'on l'a joué lorsqu'il voit Marianne embrasser l'homme qu'elle prétendait être son frère. Il abat son rival puis la jeune femme et téléphone ensuite à la police. Puis, le visage peint en bleu, il se barde d'explosifs auxquels il met le feu."

Pour que Raymond Devos accepte un rôle dans un film, fallait-il que celui-ci ne soit surtout pas à voir au premier degré.

Poésie :

Jean-Claude Pirotte, "Blues de la racaille", Ed. de la Table Ronde, 2006.
Raison(s) de ce choix ?
Certes pas à cause de ces hasards et nécessités qui nous ont fait naître Namurois tous deux, ayant "fréquenté" ensuite le même Athénée de Gembloux, avec son père qui confirma ma "vocation" de prof dans sa discipline et me (pour)suivit jusqu'à être mon premier inspecteur.
Certes pas plus parce qu'avocat, il perdit sa robe pour une sombre histoire en la prison de Namur avant que j'y sois conseiller laïque.
Certes pas parce que Jean-Claude fut comme un frère forcé à être doué pour les solitudes et les exils. Que longtemps il se mit à l'abri des regards inquisiteurs dans les Ardennes de France, franchissant les rideaux de pluies rethèloises.
Certes pas parce que j'ai mis mes pas dans les siens (alors, là, ça ne me ressemble pas) en parcourant les dessous du plateau de Langres, le Mont-Afrique, les Montagnes Noires...
Alors ce choix ? Parce qu'il n'y a qu'un seul poète dont j'aurais aimé illustrer l'itinéraire de mots et de plaies. Jean-Claude Pirotte, aujourd'hui sans doute en Arbois et qui ne lira pas ces lignes qui lui arracheraient une grimace.

L'auteur par les Ed. de la Table Ronde :

- "Jean-Claude Pirotte est né à Namur le 20 octobre 1939, le même jour que Rimbaud.
De 1964 à 1975, il est avocat au Barreau de Namur.
En 1975, il est accusé (il nie toujours les faits) d'avoir favorisé la tentative d'évasion de l'un de ses clients. Rayé du Barreau et condamné à dix-huit mois de prison, il part en cavale dans la province française, en Catalogne et dans le Val d'Aoste.
En 1981 : péremption de la peine, il publie Journal moche."

Francine Ghysen :

- "La verve sarcastique explose, déborde dans un vengeur Blues de la racaille dont le rouge et le noir tranchent sur le bleu mauve qu'évoque plutôt ce poète du demi-jour, du temps précieux déjà en fuite, des secrets perdus, du désespoir feutré."
(Promotion des livres, Communauté Française de Belgique).

Bibliographie (approximative) :

- Goût de cendre [poèmes], Liège, G. Thone, 1963.
- Contrée [poésie], Liège, G. Thone, 1965.
- D'un mourant paysage [poèmes], Liège, G. Thone, 1969.
- Journal moche [essai], Paris, Luneau-Ascot, 1981.
- La Pluie à Rethel [roman], Paris, Luneau-Ascot, 1982.
- Fond de cale [roman], Paris, Le Sycomore, 1984, 145 pages.
- La Vallée de misère [poèmes], Cognac, Le Temps qu'il fait, [1987] 1997.
- Les Contes bleus du vin [chroniques], Cognac, Le Temps qu'il fait, [1988] 1993, 117 pages.
- Rue des Remberges [prélude], Cognac, Le Temps qu'il fait, [1989] 2003, édition revue et augmentée, 42 pages.
- Un été dans la combe [roman], Paris/Bruxelles, La Longue Vue, 1986.
- La Légende des petits matins [roman], Paris, Le Vallois-Perret, Manya, 1990, 138 pages.
- Sarah, feuille morte [roman], Cognac, Le Temps qu'il fait, [1989] 1998, 136 pages.
- L'Epreuve du jour [enfantine], Cognac, Le Temps qu'il fait, 1991,142 pages
- Tio Pepe [nouvelle], Cognac, Le Temps qu'il fait, 1992, 26 pages.
- Récits incertains [récits, nouvelles, poèmes], Cognac, Le Temps qu'il fait, 1992, 131 pages.
- Il est minuit depuis toujours [essais], Paris, La Table Ronde, 1993, 209 pages. Contient Journal moche augmenté et inédits.
- Sainte-Croix du Mont, [album] illustré de photographies de Jean-Luc Chapin, Bordea
- Plis perdus [mélanges], Paris, La Table Ronde, 1994, 189 pages.
- Un voyage en automne [récit], Paris, La Table Ronde, 1996, 145 pages.
- Le Noël du cheval de bois [conte illustré], Cognac, Le Temps qu'il fait, 1997, 31 pages.
- Faubourg [poèmes], Cognac, Le Temps qu'il fait, 1997.
- Cavale [roman], Paris, La Table Ronde, 1997, 167 pages.
- Boléro [roman], Paris, La Table Ronde, 1998, 111 pages.
- Mont Afrique [roman], Paris, Le Cherche midi, 1999, 138 pages
- Autres arpents [chroniques], Paris, La Table Ronde, 2000, 160 pages.
- Enjoués monostiches, avec des linogravures de J. M. Queneau, Vézelay, Éd. de la Goulotte, 2000, non paginé
- Ange Vincent [roman], Paris, La Table Ronde, 2001, 127 pages.
- Bourgogne, Franche-Comté, texte de Jean-Claude Pirotte ; photographies de Stuart Franklin, Paris, National geographic, 2002, 290 pages
- Un rêve en Lotharingie [récit], Paris, National Geographic Society, 2002, 60 pages.
- Dame et dentiste [poèmes], Paris, Inventaire/Invention, Coll. " Textes ", 2003, 38 pages.
- La boîte à musique [poèmes], La Table ronde, 2004, 141 pages.
- Fougerolles[poèmes], Fontaine-lès-Dijon, Virgile, Daniel Legrand éditeur, coll. " Suite de Sites ", 2004, 63 pages.
- Une adolescence en Gueldre [roman], Paris, La Table Ronde, 2005, 198 pages.
- Un bruit ordinaire [roman-poème], suivi de blues de la racaille [poèmes], Paris, La Table Ronde, 2006, 131 pages.
- Expédition nocturne autour de ma cave [récit], Paris, Collection "Ecrivins", Editions Stock, 2006, 96 pages.
- Absent de Bagdad [roman], Paris, La Table Ronde, Collection Vermillon, 2007, 144 pages.
- Hollande [poèmes et peintures], Paris, Le Cherche Midi, Collection Amor Fati, 2007, 72 pages.
- avoir été [poème], Châtelineau (Belgique), Le Taillis Pré, avril 2008, 66 pages. 40. Passage des ombres [poèmes], Paris, Editions de La Table Ronde, avril 2008, 206 pages.
- Revermont [poèmes], Cognac, Le temps qu'il fait, octobre 2008, 108 pages.

Si dans ce monde luxuriant de livres, vous ne vous délectiez pas de l'un de ces volumes au moins, vous en resteriez au niveau de curiosité poétique du président (français) actuel.


1 commentaire:

Anonyme a dit…

Je suis un peu en retard dans la consultation des pages de ton blog, et je remonte le temps aujourd'hui. Tu dois savoir que j'en suis une fidèle. Je ne rate aucune parution mais parfois je lis par après.
J'aime beaucoup la façon dont tu parles de Jean-Claude Pirotte dont j'ai lu et adoré beaucoup de livres mais je ne les ai pas tous lus.
J'entretiens avec lui une correspondance épistolaire épisodique. Je lui écris à Arbois et il répond chaque fois.
Je l'ai revu voici une bonne année à la Maison de la Poésie à Namur lors d'une conférence. A l'issue de celle-ci, ses amis organisateurs de la soirée (Goffinon et le Dr Sondag notamment) l'ont attendu en vain au repas : il a préféré continuer à boire avec d'autres ours plus mal léchés.
J'ai pensé à cela en voyant, dans la vidéo, le verre à Rochefort posé sur la table.